Pour mieux vulgariser les collections conservées dans la réserve et pas connues du public, le programme Création / Patrimoine a été initié. Il insiste sur le dialogue entre l’art contemporain et les collections historiques. Des artistes du monde entier sont invités dans ce programme. Ces invitations passent très souvent par des résidences artistiques consistant à produire des œuvres sur la base d’une ou plusieurs pièces des collections du musée.
En 2016, le musée organisait une exposition sur le textile regroupant quelques pièces de sa collection et les œuvres de six artistes sénégalais (Aicha Aidara, Alioune Badiane, Viyé Diba, Kalidou Kassé, Souleymane Keita et Ablaye Ndoye). Viyé Diba reviendra au musée en décembre 2022 pour une résidence de trois semaines concentrée sur un cache sexe Bété de Cote d’ivoire conservé dans les réserves. Ce travail est connecté à sa pratique solidement ancrée dans la terre et la verticalité des structures tout en interrogeant les matériaux et savoir-faire.
En 2019, le musée expose l’œuvre de Heinz Mack, artiste allemand cofondateur du groupe zéro. Il présentait alors son travail en dialogue avec les artefacts du musée et ceux d’art africain de sa collection dans l’exposition « Mouvement et Lumières ». En 2021, l’artiste congolais Ghislain Ditshekedi effectue une résidence d’un mois avec un travail dédié à l’Os d’Ishango. Collecté à Ishango en République démocratique du Congo en 1950 par l’archéologie Jean de Heinzelin et conservé au Musée des sciences naturelles de Bruxelles, cet outil est le support de multiples spéculations sur l’origine des mathématiques en Afrique.
Plus récemment, l’artiste camerounais Hervé Youmbi a réalisé de merveilleux masques perlés sur la base des œuvres du pays bamiléké du Cameroun. Cette résidence était destinée à ressortir les similitudes entre les rites d’initiation chez les bamiléké et les diolas de la Casamance (sud du Sénégal). Dans le même esprit, le photographe sénégalais Ibrahima Thiam a travaillé sur les croyances et les imaginaires des sociétés africaines en s’inspirant des collections de la photothèque de l’IFAN et de quelques images prises au Benin dans les années 1940 par Georges Labitte.
Dans le cadre de la résidence organisée en 2023 en partenariat avec le projet Talking Objects, les artistes Henri Sagna et Élise-Fitte Duval ont été invités. Élise-Fitte Duval a sélectionné trois objets : un cor de chasse utilisé chez les Lobi, acheté en Haute-Volta en 1954 par Alexandre Adandé, une boule de terre qui est une amulette Bambara, achetée par M. Lamine Touré au Soudan français en 1955 et une poterie qui sert de couscoussier. Elle a rapporté ces objets à la partie du mythe fondateur de l'origine du royaume du Manding et de l'histoire de Sogolon. Henri Sagna quant à lui s’est concentré sur le sens et l’usage du patrimoine en partant d’un vase en terre cuite originaire du Sénégal. Son projet a questionné les propriétés du vase et les multiples usages de l’eau dans les croyances africaines.
Le programme Création/Patrimoine stimule la création artistique et la réflexion autour de l’histoire de l’art. Il contribue à mieux préserver les collections, mais aussi à renforcer l’étude et la documentation des œuvres par la production de catalogues thématiques.
